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03/04/2009 – Interview : Adrien Giraud, sénateur de Mayotte

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{xtypo_dropcap}M{/xtypo_dropcap}ayotte Hebdo : Que représente pour vous le 29 mars ?

Adrien Giraud : D'abord, la joie d'être arrivé jusqu'au 29 mars et puis le début d'un grand chantier. Parce que c'est à partir du 30 mars que les élus de ce pays doivent penser comment construire Mayotte. Jusqu'à maintenant, nous étions en chantier mais on ne savait pas sur quel plan. Aujourd'hui nous avons un statut stable qui est le statut de la départementalisation, qui sécurise Mayotte. Pour moi, c'est le début d'un grand chantier, avec les architectes qu'il faut, avec l'architecture que le gouvernement nous installe. Aujourd'hui, il faut que nous nous mettions au travail, tous les élus et tous les gens de bonne volonté, pour essayer de construire Mayotte dans l'ordre et dans l'harmonie.

 

MH : Mais c'est aussi la fin d'un long combat pour les Mahorais…

AG : Le premier combat des Mahorais a été d'abord de se séparer des îles Comores. C'est un grand combat car on était à contre-courant de l'Histoire. Le deuxième combat, si on peut l'appeler ainsi, c'était de pouvoir s'installer, s'ancrer dans la République. Et nous sommes arrivés, le 29 mars, à nous ancrer définitivement.

 

MH : Pensez-vous qu'aujourd'hui la jeunesse mahoraise, qui n'a pas connu la situation avant 1974, comprend toujours ce combat ?

AG : Ce que vous dites, je l'avais ressenti pendant un moment, pendant nos entretiens avec nos hauts responsables métropolitains. J'avais senti qu'ils cherchaient à gagner du temps, en se disant que peut-être la nouvelle génération allait changer d'avis et choisir le "sens de l'Histoire", comme on dit. Mais vous avez vu que le résultat que l'on a obtenu le 29 mars est de 95,2%. A qui peut-on attribuer ça ? Moi, je peux vous dire même les noms des gens qui ont voté "non", mais je n'ai pas le droit.

 

{xtypo_quote}C'est nous qui avons voulu être avec la France, ce n'est pas la France qui est venue nous coloniser{/xtypo_quote}

 

MH : Il y a une trentaine d'années, le statut hybride et provisoire de Mayotte entre Dom et Tom était-il un frein pour les investissements ?

AG : C'était une difficulté énorme pour les investisseurs. Vous vous rendez compte qu'en 1974, quand nous nous sommes séparés des Comores, il n'y avait que trois écoles à Mayotte. Il n'y avait pas d'eau, pas d'électricité. Comment voulez-vous que des investisseurs viennent dans un pays où il n'y a pas d'eau, pas d'électricité, pas d'école ? C'est déjà un handicap assez important qui décourageait les investisseurs. Aujourd'hui, ces handicaps ont été levés.

Il n'y avait pas non plus de transport aérien. Les premiers parcours que nous avons faits pour rejoindre la Réunion puis la Métropole, on les faisait par avion militaire. Quand on déposait la demande pour aller sur la Réunion puis en Métropole, il fallait demander au général de la région d'autoriser l'avion militaire à prendre des civils. Les premiers vols commerciaux ne datent que de 1976.

Nous avons vécu l'enfer à Mayotte. Les gens qui arrivaient jusqu'à Mayotte repartaient tout de suite en disant : "Où est-ce que nous sommes ici ? Nous sommes dans la jungle !".

Malgré cette souffrance, les Mahorais ont tenu à être avec la France. Pourquoi ? C'est à cause des exactions de nos voisins, des razzias. D'ailleurs le roi Andriantsouli en a eu assez, c'est pourquoi il a donné Mayotte à la France. Nous, nous n'avons jamais été colonisés. On nous a donné à la France et on a fait l'adhésion à la France. Nous ne sommes pas une colonie française. Les autres, oui. Ils sont venus se rattacher avec nous ensuite, sous le protectorat. Mais Mayotte est restée seule avec la France pendant plus de 60 ans. Les autres îles sont venues nous rejoindre parce que la France avait installé la paix. Il n'y avait plus la guerre des sultans batailleurs.

 

MH : Si Mayotte n'a jamais été une colonie, c'est ce qui la différencie de tout l'Outremer français ?

AG : Nous avons adhéré à la France. Nous ne nous considérons pas comme une colonie, c'est nous qui avons voulu être avec la France, ce n'est pas la France qui est venue nous coloniser.

 

MH : Contrairement à ce que vient de dire la Ligue arabe, à ce qu'a dit l'Union africaine ou l'Onu…

AG : Absolument. C'est totalement faux. Je défie aujourd'hui les historiens comoriens ou les historiens de l'Onu de regarder l'Histoire de Mayotte, qui a été seule avec la France pendant plus de 60 ans. Les autres îles sont venues se rattacher après. C'est ça qui différencie aujourd'hui les Comores de Mayotte. Elle a été rattachée aux Comores parce qu'à un moment "Madagascar et dépendances" a été créée pour des commodités administratives. La France a créé l'archipel des Comores pour des raisons de commodités administratives.

 

{xtypo_quote}En 1974, si ceux qu'on appelle les "serrez-les-mains" n'avaient pas fait pression sur les gens, on aurait pu avoir un pourcentage beaucoup plus important{/xtypo_quote}

 

MH : Quels souvenirs gardez-vous de la séparation avec les Comores ?

AG : En 1974, on nous a consultés pour savoir si les quatre îles étaient favorables à l'indépendance. Mayotte a répondu "non" à 64%. On aurait pu avoir un pourcentage beaucoup plus important si l'administration territoriale de l'époque n'avait pas fait pression sur les fonctionnaires. Nous étions sous une administration territoriale, avec un chef de gouvernement à Moroni et des chefs de districts dans les îles. Et si ceux qu'on appelle les "serrez-les-mains" n'avaient pas fait pression sur les gens, on aurait pu avoir un pourcentage beaucoup plus important.

Quand on a tiré les conclusions de ce référendum au Parlement, la France a dit aux Comores : "On ne peut pas ne pas respecter la parole donnée". On a dit aux Mahorais que l'article 53 de la Constitution s'applique et que nulle cession de territoire n'est possible sans le consentement de la population. A ce sujet, j'ai une anecdote personnelle à vous confier.

A ce moment-là, quand les Comoriens ont vu que les Mahorais ont voté "non", Ahmed Abdallah, le président du gouvernement comorien, est allé à Paris et a demandé au gouvernement français de céder. Le gouvernement français n'avait pas encore décidé d'envoyer quelqu'un à Mayotte. Quand Ahmed Abdallah est rentré aux Comores, il a déclaré l'indépendance unilatérale des Comores.

Quand nous, les élus mahorais, nous avons entendu à la radio qu'Ahmed a claqué la porte de la rue Oudinot, on s'est dit : "ce type-là va aller aux Comores et déclarer l'indépendance". Ca n'a pas loupé : il est rentré le jeudi et le dimanche il convoqué l'assemblée territoriale des Comores pour déclarer l'indépendance unilatérale. Nous on avait déjà préparé un télégramme à Paris pour dire qu'on rejetait l'indépendance d'Ahmed Abdallah. On l'avait préparé en 6 exemplaires. On devait l'envoyer au Président de la République, au Premier ministre, au président du Conseil constitutionnel, au président du Conseil d'Etat, au président du Sénat et au président de l'Assemblée nationale.

C'était un dimanche et la seule Poste ouverte à Paris était celle de la rue du Louvre. J'y suis allé avec les télégrammes, parce que Marcel Henry, qui était avec moi en France à l'époque, était au mariage de sa nièce à La Rochelle. C'est lui qui avait les copies du télégramme dans sa mallette. J'ai téléphoné au directeur de cabinet du président du Sénat Alain Poher pour lui dire que je n'avais pas les télégrammes. Il m'a dit d'aller à son bureau à la présidence du Sénat : "Regardez dans une armoire, il y a un classeur "Mayotte" où vous trouverez une copie du télégramme. Je vais téléphoner à la présidence pour que les huissiers vous ouvrent la porte de mon bureau et l'armoire, pour que vous fassiez une photocopie". J'y suis allé à 15h. J'ai couru à la Poste. j'ai donné les copies du télégramme à la postière, elle me dit :"Je ne peux pas accepter les télégrammes tapés à la machine. Il faut que vous puissiez les transcrire à la main". J'ai pris les télégrammes et je les ai transcrits à la main. J'ai terminé, il était 20h, ils allaient bientôt fermer. Quand

Quand je les donne à la postière, elle me dit qu'il faut payer. Je mets mes mains dans les poches et je vois que je n'ai pas assez d'argent pour payer. J'ai donné ma montre, ma bague, ma carte d'identité et je lui ai dit :"Commencez à les envoyer, madame, je cours chez moi dans le 2e arrondissement chercher de l'argent". Quand je suis revenu, la dame avait eu la gentillesse de faire partir les télégrammes… Ce jour-là, j'avais un peu de fièvre. Je me couche dans mon lit et j'écoute France International. A minuit pile, j'entends la présidence de la République annoncer qu'elle vient de recevoir un télégramme des cinq élus mahorais de l'assemblée territoriale refusant l'indépendance et que le gouvernement français prend acte de cette décision. Marcel, qui rentrait sur Paris, a dit "ouf !" en l'entendant dans sa voiture. Et moi aussi j'ai dit "ouf !" et ma fièvre est passée. Pour vous dire le soulagement que j'ai eu. C'est l'acte qui m'a complètement rassuré. Ensuite, il fallait qu'on installe Mayotte dans ses nouvelles fonctions…

 

{xtypo_quote}J'ai dit à Ali Soilihi : "Il reste deux heures pour qu'un avion puisse décoller ou atterrir, sinon même avec les légionnaires qui sont là, il se passera un massacre"{/xtypo_quote}

 

MH : Comment le gouvernement français a réagi ?

AG : Le gouvernement n'a pas envoyé un haut-commissaire mais un administrateur provisoire, en attendant que le gouvernement puisse nommer un préfet. Nous avons décidé, quelques personnalités de Mayotte, que nous ne pouvions pas rester comme ça. On s'est réuni, on était une vingtaine et on a nommé Bamana comme préfet élu. Il a désigné des chargés de mission dans chaque service. Moi, j'étais chargé de mission concernant les services de la douane et la Poste. Quand j'ai fait l'inventaire de la douane, j'ai immédiatement tout donné au Trésor public. Quand j'ai fait celui de la Poste, je n'ai quasiment pas trouvé de timbres. J'ai fait prendre un arrêté par le préfet élu m'autorisant à couper en quatre les timbres. L'arrêté a été publié et j'ai fait découper les timbres. J'ai multiplié le stock de timbres par quatre ! Ca nous a permis de tenir, parce que les Comores refusaient de nous donner des timbres et on ne pouvait pas aller en acheter là-bas.

 

MH : Que s'est-il passé ensuite ?

AG : On a continué à travailler en attendant la nomination du préfet. Mais il y a eu entre-temps Ali Soilihi qui a fait un coup d'Etat aux Comores. Il s'est dit : "Ce n'est possible, il faut que j'arrive à ramener Mayotte aux Comores". Il était d'abord venu avec une délégation africaine ici pour essayer de voir Marcel Henry et Bamana. Moi, j'étais reparti sur Paris pour essayer de pousser pour qu'on puisse nommer rapidement un fonctionnaire de haut niveau pour venir administrer ici. Ils ont reçu le veto des élus mahorais.

Il s'est dit : "Comme ils refusent, je vais imiter le Maroc et sa Marche Verte" (marche pacifique lancée par le roi Hassan II le 6 novembre 1975 pour récupérer le Sahara occidental qui était occupé par l'Espagne, ndlr). Ali Soilihi a voulu faire la "marche rose", la couleur des foulards des 50 jeunes qui sont venus avec lui.

Quand on m'a alerté qu'il allait débarquer à l'aéroport, j'ai réagi tout de suite. A l'époque, j'habitais à Pamandzi et nous avions des jeunes que nous avions surnommé les "commandos". J'ai donné un coup de voiture dans tous les quartiers où je connaissais les leaders, je leur dis : : "Vite ! A l'aéroport !". Ils y sont allés et je suis allé voir l'administrateur à Dzaoudzi pour lui dire : "Pour qui nous prenez-vous ? Il y a un avion qui part de Moroni et qui vient là et vous, vous me dites que vous n'étiez pas au courant ?".

Vous voyez l'endroit où il y a RFO ? J'ai fait ouvrir la maison qu'il y a derrière. C'était une maison qui appartenait aux ministres qui venaient y séjourner. J'ai dit aux commandos : "Vous les parquez là-dedans. S'ils ne veulent pas, moi, c'est la castagne". Ils ont accepté et sont entrés dedans. Je suis arrivé et j'ai dit à Ali Soilihi : "Ecoute, cher ami, pour l'instant je ne veux pas te faire de misères, mais tu vas me dire ce que tu veux faire, on va s'asseoir et discuter". Il me dit : "On est venu simplement pour une marche pacifique".

J'ai remarqué que parmi ces jeunes il y en avait un qui avait une machine à écrire sur l'épaule, d'autres qui avaient des papiers. J'ai fait fouiller les sacs, il n'y avait rien dedans. Quand j'ai entendu l'avion repartir, je me suis dit : "Il y a anguille sous roche". J'ai fait demander à mes commandos de mettre sur le terrain d'aviation tout ce qu'ils pourraient trouver : pirogues, pierres ou autres pour le rendre impraticable. Ils ont débarqué un dimanche à 6h30. Vers11h, j'entends un avion qui tourne car il ne peut pas atterrir. Je vois le patron de l'avion Yves Lebret (fondateur d'Air Comores, la première compagnie aérienne inter-îles, ndlr) chuchoter à Ali Soilihi : "L'avion ne peut pas atterrir, je ne sais pas ce qu'il se passe". Ils voulaient sortir, j'ai dit : "Non, personne ne bouge d'ici".

On a appris par la suite que dans cet avion-là, il y avait des militaires. Il n'a pas pu se poser. Je leur ai dit, à Ali Soilihi et à ses gens : "Vous partez, ou bien vous ne sortez pas d'ici vivants. Je vous laisse. Si vous êtes prêts à discuter, on m'appellera". Je repars chez moi et l'administrateur a interdit la barge de faire l'aller-retour entre Grande Terre et Petite Terre car la radio des Comores diffusait : "Ca y est, Ali Soilihi a pris Mayotte". Quand ils ont vu l'avion revenir chez eux, ils ont dit : "Ca n'a pas marché mais ça va marcher parce qu'Ali Soilihi est maître de la situation".

Il était 15h. A 15h30, un des "foulards roses" reçoit un coup de caillou. J'ai dit : "amenez-le à l'hôpital et vous me le ramenez". Cinq minutes après que je sois rentré chez moi, on m'appelle pour me dire qu'il y a un bidon d'essence qui vient d'être renversé dans la cour de la maison où ils étaient. Les commandos avaient décidé de foutre le feu. J'ai averti l'administrateur qui a demandé un cordon de légionnaires pour les protéger. J'ai dit à Ali Soilihi : "Il reste deux heures pour qu'un avion puisse décoller ou atterrir, sinon, même avec les légionnaires qui sont là, il se passera un massacre".

Il a accepté mais il m'a dit qu'il voulait auparavant téléphoner. Je lui ai dit : "Le seul moyen est que je vous emmène à l'aviation civile, parce qu'avec la BLU on entendra ce qu'on vous dira et ce que vous direz". Il a appelé un dénommé Kéké pour lui dire que ça n'avait pas marché et que s'il ne l'autorisait pas à rentrer maintenant, il allait y avoir des morts.

Le DC4 était stationné à Anjouan où ils avaient débarqué les militaires. Je dit à Ali Soilihi qu'il dise à Kéké que l'avion arrive à vide, qu'on va l'arrêter en bout de piste et le vérifier d'abord. Je lui dis : "S'il y a un seul soldat dedans, c'est l'avion qui brûle, avec les gens qui sont ici". En revenant, Ali Soilihi me dis : "Ecoute, Adrien, ce que tu fais là est dur pour moi. Laisse-moi garder la face en sortant de la maison en marchant et en chantant pour aller jusqu'à l'aéroport". Je lui dis :"Si tes gars ne font pas les cons, moi je te laisse faire ça". Ils sont partis en rang en chantant des chansons militaires jusqu'à l'aéroport. Vingt minutes plus tard, ils sont montés dans l'avion vers les Comores.

On a été condamnés, ma tête a été mise à prix aux Comores, avec une effigie "Wanted" sur la place de Badjanani à Moroni.

 

{xtypo_quote}Dans les lois qui ont été votées à l'Assemblée nationale et au Sénat, on devait être consultés en 1979{/xtypo_quote}

 

MH : C'est ensuite que le développement de Mayotte a pu réellement démarrer…

AG : Oui, un préfet a été nommé et on a commencé à voir la couleur d'une administration, un petit groupe électrogène, un peu d'eau. Au fur et à mesure, on a continué avec les autres à aller en Métropole pour dire que nous sommes décidés à rester avec la France et que nous voulons le statut de département. Il y a un ministre qui nous a dit : "Le statut de département, vous pourrez l'avoir un jour, mais pour l'instant vous êtes à un niveau de développement où vous ne pourrez pas le supporter, et ce n'est pas vous rendre service que de vous le donner". Ca a été ensuite répété par Jacques Chirac, Premier ministre, qui nous a dit : "Les Mahorais, je comprends que vous aspiriez à être département, mais ne mettez pas la charrue avant les bœufs".

 

MH : Finalement, l'Accord de 2000 a commencé à enclencher le processus…

AG : Non, avant l'Accord de 2000 on avait déjà enclenché le processus, bien avant. Dans les lois qui ont été votées à l'Assemblée nationale et au Sénat on devait être consultés en 1979, mais la consultation n'a jamais eu lieu. Après, il y a eu la gauche qui est arrivée au pouvoir et qui était contre le fait que Mayotte reste avec la France. Mitterrand avait dit que c'était une "erreur" d'avoir gardé Mayotte. Le Président Giscard d'Estaing, lui, avait carrément dit : "Il y a l'intangibilité des frontières issues de la colonisation, Mayotte et les Comores font un tout".

Tous ces gens-là n'étaient pas pour que Mayotte devienne aujourd'hui un département. Même Balladur, qui était venu ici pendant qu'il était Premier ministre et candidat à l'élection présidentielle, avait dit : "Si je suis élu, six mois après, Mayotte sera érigée au statut de département". Aujourd'hui, il a dit à un journaliste du Figaro qu'il aurait encore fallu retarder la consultation de Mayotte…

Je voudrai saluer le courage qu'a eu le Président de la République Nicolas Sarkozy. C'est immense, le courage qu'il a eu aujourd'hui de tenir sa parole. Il a écrit aux Mahorais quand il était candidat que si les Mahorais le demandent, il les consultera sur le statut de leur choix. Il a bravé tout le monde qui était contre. Il faut le faire, parce que la France a quand même des amis en Afrique et dans le monde arabe. Tous ces gens-là étaient contre. Le président comorien avait alerté tous ces gens-là. Nicolas Sarkozy a tenu sa parole et il faut saluer ce grand courage. Si un jour à Mayotte nous devons monter un monument historique, ce sera une statue à son effigie.

 

MH : Depuis le 29 mars, pensez-vous que le MDM a encore un sens ?

AG : Non, je crois que le MDM a accompli son devoir. Il a été fait pour la départementalisation qui est là. Donc il n'a plus lieu d'être aujourd'hui.

 

Propos recueillis par Julien Perrot

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Mayotte hebdo n°1085

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